Ce que voit le troupeau

La vision des bovins, animaux de proie à l’origine, est adaptée à la vie en prairies ouvertes. Leurs yeux ne fonctionnent donc pas comme les nôtres et ils perçoivent leur environnement d’une manière totalement différente. Il n’est donc pas toujours facile pour nous de comprendre le comportement de vaches apparemment craintives qui semblent voir des dangers partout!

Changement de perspective

Pour comprendre le comportement des bovins et faciliter l’interaction avec eux, il faut pouvoir imaginer ce qu’ils voient et comment ils le voient. Pour commencer, il est utile de se mettre à la même hauteur qu’une vache (rétive), en pliant légèrement les genoux, pour découvrir ce qui lui fait peur.

Notre recommandation:

Voici quelques vidéos sur Internet qui donnent une idée de l’angle de vision des vaches:

 

 

Un amplificateur de lumière

La nuit ou au crépuscule, les bovins voient mieux que les humains, la lumière se reflétant sur une couche réfléchissante située au fond de l’œil, le tapetum lucidum. C’est pour cela que leurs yeux brillent à la lumière des phares ou d’un flash (réflexion de couleur jaune à verte).

Une bonne vision nocturne

Grâce à cet amplificateur de lumière, les vaches peuvent bien voir à 0,05 lux. De nuit, elles ne perçoivent aucune couleur mais y voient juste assez pour pâturer. A titre de comparaison: une nuit de pleine lune équivaut à env. cinq fois 0,05 lux (soit env. 0,25 lux).

Contrastes lumineux

Mais la conséquence de cette bonne vision nocturne est une plus grande sensibilité aux contrastes. Autrement dit, les vaches sont plus facilement éblouies que nous et les ombres les irritent.

Coins sombres

Pour la vache, un coin sombre dans l’étable est un véritable trou noir. Elle ne s’en approchera sous aucun prétexte.

Ombre et lumière

Lors du transfert au pâturage, l’alternance de zones d’ombre et de lumière peuvent rendre les vaches hésitantes et la progression difficile.

Reflets miroitants

Les flaques ou les reflets miroitants sur l’eau peuvent perturber les bovins.

Réflexions de lumière

Les objets métalliques réfléchissant la lumière (en salle de traite par exemple) sont une source d’irritation pour les vaches, qui feront tout pour les éviter.

Temps d’accommodation

Le temps d’accommodation de l’œil des bovins à un changement d’intensité de lumière est cinq fois plus long que pour l’homme. C’est la raison pour laquelle ils sont d’abord aveuglés lors du passage d’un endroit éclairé à un endroit sombre et vice-versa.

Dedans - dehors

Il faut un certain temps à l’œil du bovin pour faire la mise au point, p. ex. quand la vache passe brusquement d’un emplacement ensoleillé à une étable sombre. Une lumière indirecte peut atténuer le problème.

Embarquement et débarquement

Lors du débarquement de la bétaillère, la vache doit d’abord s’habituer au brusque changement de luminosité (accommodation visuelle).

Conduite du troupeau

Conduire une vache ou un troupeau dans des conditions de luminosité changeantes requiert patience et savoir-faire.

A contre-jour

Les vaches ne se déplacent pas volontiers face au soleil. En tenir compte si possible lors de la planification des chemins et la construction de nouveaux bâtiments (sortie de la salle de traite p. ex.).

Ondes bleu-vert

Un éclairage homogène à l’étable facilite le travail de l’éleveur. Plusieurs études recommandent tout particulièrement la technologie LED. Elle serait plus adaptée à la vision des bovins, qui voient essentiellement les ondes bleu-vert.

Notre recommandation:

Les avantages d’un éclairage LED à l’étable en termes de rendu des couleurs et de confort visuel sont décrits dans cette présentation Powerpoint. Il évoque aussi l’influence d’un éclairage adéquat sur le métabolisme, la production d’hormones, la croissance et la fertilité des bovins.

Daltonisme rouge-vert

Les bovins perçoivent mal le spectre du rouge. La perception des couleurs des bovins est ainsi proche de celle de personnes atteintes de daltonisme rouge-vert.

Evaluer les distances

Les bovins étant à l’origine des animaux de prairie et proies potentielles, ils doivent voir à une grande distance. Leur champ de vision est totalement différent de celui d’animaux prédateurs.

Une vision panoramique

Avec leurs yeux saillants situés de chaque côté de la tête, les bovins disposent d’une vue panoramique à presque 330°.

Prédateurs vs. animaux de proie

La plupart des prédateurs ont les yeux orientés vers l’avant. Ils peuvent ainsi mieux focaliser les proies potentielles et évaluent mieux les distances que les animaux de proie.

Perception de l’espace

La position latérale des yeux réduit la capacité de perception des distances. Pour une bonne perception de l’espace, les deux champs de vision monoculaires de chaque œil doivent se superposer. Le siège de la vision situé dans le cerveau les regroupe en une image tridimensionnelle, ce qui permet à l’animal d’évaluer les distances par exemple. On parle de vision binoculaire (voir graphique).

Angle mort

Derrière la vache se trouve un angle mort (voir graphique) où elle ne voit rien. Si l’on pénètre cette zone aveugle sans faire de bruit préalablement, la vache risque de réagir violemment.

Bien en face

La vache ne peut estimer la distance entre un objet et elle-même que si cet objet se trouve directement face à elle. Ce qu’elle voit de côté, elle le distingue de la même manière que si nous fermons un œil. Il est donc plus agréable pour une vache si nous l’abordons par l’avant. Sinon, elle tournera la tête pour mieux nous distinguer.

Des contours flous

La vache dispose d’une acuité visuelle réduite et a de la peine à discerner les contrastes, car le cristallin bovin de parvient pas à faire une mise au point (accommodation) optimale. Elle ne voit donc nettement que de près.

Mouvements à l’arrière

En tant qu’animaux de fuite, les bovins ont une perception plus fine des mouvements, à l’origine pour surveiller l’approche éventuelle d’un prédateur. Elles perçoivent notamment les mouvements dans la zone postérieure.

Des mouvements amplifiés

Les vaches perçoivent davantage les mouvements que nous: elles reconnaissent 40 à 60 images par secondes, alors que nous n’en enregistrons que 25.

Des mouvements réguliers

Un mouvement régulier (un racleur à lisier p. ex.) est plus facilement évaluable et donc agréable pour la vache.

Quand ça bouge

Des simples mouvements des bras, des branches ou des bandes plastiques agitées par le vent font facilement peur aux bovins.

Quand ça clignote

Les experts déconseillent l’utilisation de lampes dotées d’un variateur d’intensité à l’étable. Cette lumière peut être dérangeante pour les animaux, qui la perçoivent comme clignotante.

Le conseil du praticien:

  • Ne pas faire avancer les animaux vers une zone sombre; veiller à un bon éclairage.
  • Si les conditions d’éclairage ne peuvent pas être optimisées: faire preuve de patience en faisant passer les animaux de la lumière vers l’ombre ou vice-versa.
  • Réduire les ombres, facteurs d’inquiétude pour les bovins.
  • Se mettre à la place de l’animal et anticiper ce qui pourrait le perturber.
  • Approcher les bovins par l’avant pour éviter de les surprendre.
  • Eviter les mouvements brusques.  

Vous trouverez aussi ces informations dans l’article Conseil 04/2016 La vision des vaches